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8 mars 2013 5 08 /03 /mars /2013 11:30

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Toujours en éveil, en recherche, en questionnement, Hugo Chavez pouvait vous entretenir de longues heures des expériences historiques de changement, des processus qu’il cherchait lui-même ou des grands penseurs dont ceux Funeral_de_Hugo_Chavez_-_Presidencia_de_la_Nacion_Argentin.jpgdu marxisme. Ses réflexions mêlaient toujours à la fois Karl Marx et Simon Bolivar, qu’il a fait revivre, Gramsci ou d’autres penseurs progressistes, et sa foi chevillée au plus profond de lui-même dans le Christ. Tout cela le faisait aimer passionnément les gens, son peuple et l’Amérique latine qu’il s’acharnait à libérer des dominations.

Au cours de sa vie et dans l’exercice de ses hautes responsabilités, il n’a cessé, notamment après le mois de mars 1994, d’évoluer, recherchant les voies d’un processus démocratique et progressiste de changement pour son pays et toute l’Amérique latine. Il le fera avec beaucoup de tâtonnements, d’hésitations, jusqu’à inventer ce concept de « socialisme du XXIe siècle ». Ce projet était comme un héritage de l’échec du soviétisme et de sa recherche, alliant de multiples pensées révolutionnaires auxquelles s’intégrait toujours pour lui la vie de Jésus-Christ. C’est un ami communiste, Luis Miquilena, qui le convaincra de choisir la voie démocratique des urnes pour devenir président du Venezuela, qu’il baptisera plus tard « République bolivarienne du Venezuela ». Personne ne peut contester que, depuis 1999, il aura organisé et gagné une multitude d’élections : présidentielle, législatives, et des référendums modifiant la Constitution. Avec ce processus de transformation constitutionnelle, il ancrera dans la vie politique de son pays un mouvement démocratique participatif en donnant notamment la parole aux plus pauvres. Il aura cherché une voie anticapitaliste de transformation sociale et écologique avec plusieurs succès, des avancées notables reconnues par l’Organisation des Nations unies jusqu’à la création d’un salaire minimum et une répartition nouvelle des richesses issues du pétrole en faveur des salariés et des plus pauvres. Il aura redistribué des terres aux paysans. Il aura fait œuvre de solidarité avec plusieurs pays et villes d’Amérique latine, notamment en leur fournissant de l’énergie ou en les émancipant du fardeau de leur dette, comme ce fut le cas pour l’Argentine. Il aura produit de considérables efforts pour solidariser les peuples d’Amérique latine avec la création de l’Alliance bolivarienne des Amériques et la Communauté des États latino-américains et des Caraïbes.

Sans doute peut-on dire qu’avec Lula il est celui qui aura permis d’ouvrir un chemin nouveau pour le continent latino-américain, rendant justice à celles et ceux qui ont tant souffert des affres de la colonisation puis de dictatures soutenues par l’impérialisme nord-américain. Cela ne m’a jamais empêché de considérer et de dire que certaines de ses alliances et certains de ses soutiens avec des dictateurs en Iran ou en Libye constituaient des erreurs et affaiblissaient son combat. Mais force est de reconnaître qu’il aura redonné dignité, confiance et honneur aux peuples de toute l’Amérique latine si longtemps dominés, méprisés, humiliés. Au peuple, aux partis progressistes du Venezuela de poursuivre aujourd’hui dans l’unité et la concorde son œuvre transformatrice au service du bien commun et de la solidarité. La disparition d’Hugo Chavez est une grande perte pour tous les opprimés, tous les pauvres et tous ceux qui cherchent des voies nouvelles de l’émancipation humaine. Il nous laisse une grande leçon : le monde n’est pas figé. Des évolutions révolutionnaires sont possibles. Le meilleur hommage à lui rendre est d’y participer partout.

 

Patrick Le Hyaric (L'édito de)

Titre original : « le cri des opprimés »

 

Source : L’Humanité (France) du 7 Mars 2013

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